Que croyez-vous qui vous limite?

Avez-vous conscience du système complexe de réflexes, de pensées et de mode d’action qui vous est propre, et savez-vous à quel point est composé de croyances limitantes qui vous orientent et vous guident ?

Elles sont souvent si ancrées que vous ne les considérez pas comme des croyances mais comme des données objectives. Ce qui a pour conséquence de vous empêcher radicalement d’aborder certains domaines ou de vous interdire une ou plusieurs perspectives, convaincu que vous êtes que ce n’est pas pour vous. Des pans entiers de votre vie sont dans l’ombre et dans le froid, morts à votre conscience et à votre action.

Certaines sont concoctées en votre for intérieur par des généralisations hâtives tirées d’une expérience isolée, d’autres sont le fruit de ce que l’on vous a appris, ou de ce que l’on a projeté sur vous. Certains encore sont à la croisée de ces familles : elles reposent sur ce que vous croyez que les autres attendent de vous. Voyons.

QUAND LA CROYANCE REMPLACE L’APPRENTISSAGE

Certaines croyances limitantes sont nées d’un échec qui aurait pu rester isolé mais qui, étant élevé au niveau d’exemple de ce que vous ne savez pas faire, va vous permettre de vous tenir soigneusement à l’écart de la difficulté : je suis nul en golf, il est nul en maths, elle n’a aucune aisance à l’oral. Ce sont des exemples parfaits des échecs inutiles, dont aucun apprentissage n’a été tiré. La position au golf est sans doute améliorable, suffisamment pour devenir un partenaire de golf agréable après corrections des erreurs qui vous empêchaient de progresser. Une incompétence en mathématiques révèle souvent plutôt l’incompétence des professeurs ou le manque de motivation de l’élève. Un manque d’aisance orale se corrige relativement facilement en maîtrisant parfaitement son sujet, puis en y ajoutant des valeurs personnelles qui permettent de le porter avec énergie et résonnance.

Mais il s’agit de sortir de sa zone de confort, et vous savez comme le saboteur n’aime pas ça. Il est beaucoup plus facile, faute d’être plus épanouissant, de croire à son incapacité et de se garder de toute nouvelle tentative. Et c’est en faisant cela que vous consoliderez votre peur de l’échec, puisque celui-ci en effet n’a débouché que sur la révélation de votre nullité.

Imaginez maintenant que vous essayiez une deuxième, une troisième fois, et que votre progression vous surprenne vous même, et vous mette en joie. Car c’est bien cela qu’il se passe. La joie d’apprendre et de réussir. Ce grand plaisir intérieur, cette vague d’émotion qui vous lavera de vos échecs antérieurs quand vous enverrez une balle à 200 mètres, que vous résoudrez seul votre première équation ou que votre prestation orale sera applaudie. Vous pouvez choisir de ne pas vous donner cette peine-là, de conserver votre croyance et de ne pas progresser, mais quand vous aurez entrevu ce que vous perdez à ne pas essayer, je doute que vous ne soyez pas tentés de faire l’effort !

Ce type de croyance (« je suis nul en … ») est bien souvent construit dès l’enfance, par le regard porté sur vous par votre entourage.

Mais certaines de ces croyances fabriquées de toutes pièces par le saboteur n’ont pas eu besoin d’un regard extérieur pour apparaître. Elles sont très présentes dans la vie amoureuse. « Je ne suis attirée que par des hommes compliqués, qui ne veulent pas s’engager » ai-je souvent entendu. Et pourtant il n’est pas rare que ces mêmes hommes s’engagent bel et bien peu de temps après avoir quitté la personne que je reçois. Ce qui généralement est vécu comme une confirmation de la croyance : « vous voyez bien, c’est moi qui ait un problème ». En réalité, l’homme qui prétendument ne voulait pas s’engager le voulait bien, mais le comportement de sa compagne, aux prises avec sa croyance, lui envoyait des signaux de rejet. En effet, persuadée de ne pas attirer de personne recherchant la stabilité alors qu’elle y aspirait, elle a eu une attitude désinvolte ou distante pour cacher cette aspiration, et a communiqué l’inverse de son souhait (dans le meilleur des cas) ou donné une telle impression de malaise ou d’incohérence qu’elle a éloigné implacablement tous les candidats.

LES CROYANCES FLATEUSES RESTENT DES CROYANCES

La deuxième sorte de croyances limitantes est plus sournoise : ce sont des croyances qui prennent toutes les apparences de la grandeur, alors que vous les subissez et qu’elles vous pèsent.

Ces croyances sont parfois assez flâteuses pour vous, vous risquez donc de ne pas vous méfier. Elles semblent à l’opposé des précédentes : « Martin est excellent en maths, c’est sûr, il va faire Polytechnique » ; « Albane, toi qui est tellement à l’aise avec les gens, tu feras un métier commercial » ; je pourrais continuer à l’infini mais ces deux exemples vont suffire à illustrer mon propos :
Martin est excellent en maths et nous vivons dans un pays qui valorise cette compétence plus que tout. Au point sans doute que personne n’avait remarqué que Martin était aussi excellent en français et en histoire. Depuis son plus jeune âge, Martin est défini par le fait qu’il est bon en maths et conditionné pour passer de prestigieux concours scientifiques. Mais Martin est bon en maths parce qu’il est bon partout. Ce qui le fait vraiment vibrer, c’est les histoires. Les écrire, les raconter, les découvrir. Les histoires individuelles et l’histoire des peuples. Il dévorent les romains et les livres d’histoire, il en écrit (en cachette, ce n’est pas le rôle du bon en maths), il rêve de partir à la découverte du monde pour en rapporter des nouvelles, écrivain voyageur, grand reporter, voilà ce qui le fait rêver.

Albane elle, est « à l’aise avec les gens ». Elle est en réalité assez timide et plutôt solitaire, passionnée de science et de recherche, mais très « bien élevée » et très sensible à l’image que les autres peuvent avoir d’elle. Elle déploie donc toute son habileté sociale, sa culture, et sa grâce en présence de tiers. Mais cela lui coûte énormément, elle n’en retire aucun plaisir et beaucoup de stress. Et pourtant, l’illusion est si parfaite qu’elle sera poussée vers des métiers relationnels par tous ceux qui la croiseront, alors qu’elle aurait aimé travailler dans un laboratoire de recherche.

Pour Martin et Albane, il est extrêmement difficile de faire la part des choses. Ces croyances sont d’abord celles des autres, mais des autres ayant une autorité naturelle et un fort ascendant sur eux. Si vos parents ou vos enseignants vous affirment que vous êtes particulièrement doué à quelque chose et que c’est de toute évidence votre voie, comment en douter ? Et même lorsque le doute se fait entendre, lorsque la dissonance intérieure est forte, vous les relèguerez au plus profond de votre conscience, là où vous pourrez presque les oublier, parce que rien ne vous permet (à ce moment là), de leur donner un sens.

Vous voyez donc que les croyances limitantes sous forme d’étiquette sont aussi dangereuses dans leur version positive que dans leur version négative.

CROYANCES SUR SOI ET SUR LES AUTRES

Dans la lignée de ces croyances, une troisième forme apparaît, sans doute la plus subtile, mais aussi la plus répandue, ou à tout le moins la plus prégnante dans la vie de grand nombre d’entre nous : ce que l’on croit que les autres pensent ou attendent de nous. Munis de ces croyances, nous allons nous efforcer toute notre vie de nous y conformer, sans jamais avoir pris la peine d’en vérifier la validité. Ces croyances vont naître de la somme des autres et d’un faisceau de petits indices disparates, souvent insignifiants, mais qui auront à un moment donné de notre vie pris une importance majeure. Pêle-mêle, vous trouverez celui qui croit qu’il doit gagner beaucoup d’argent pour séduire, celui qui croit que son métier n’intéresse personne, celle qui croit qu’on attend d’elle à tout moment qu’elle soit parfaite, celle qui croit qu’elle est appréciée parce qu’elle est élégante, celui qui croit que tout le monde le juge sur sa réussite professionnelle, …

QUITTEREZ VOUS LE CHEMIN BALISÉ ?

A la lecture de ce qui précède, je ne doute pas que vous ayez commencez à soupçonner certaines croyances limitantes en vous. Mais ce qui pourrait vous empêchez d’avoir envie de les démasquer, c’est qu’elles ont été très utiles à donner une direction à votre vie ! Bien des images me viennent à l’esprit : Un sillon profond creusé dans un champ, un chemin bordé de barrières et même, amoureuse de pâtisserie oblige, une poche à douille remplie de crème fouettée ! En tout cas une vie marquée, balisée, compressée, aux apparences ordonnées et rassurantes, sans place pour l’interrogation. C’est peut-être à ça que ressemble votre vie aujourd’hui. Vous savez très précisément où vous allez, et vous n’avez nulle intention de remettre votre itinéraire en cause. A moins qu’à la lecture de ce qui précède, vous n’ayez déjà ressenti quelque dissonance et que votre Grand Moi soit en train de protester qu’il est encore temps de quitter le sillon ou de sauter la barrière. A l’heure de franchir le pas, vous pouvez ressentir une dernière angoisse, mais l’immensité des possibles qui s’offre à vous sera plus forte que cette fausse sécurité qui vous retient dans ses filets.

 

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