Exercice 14 : Reconnaître que l’on s’est trompé

La lecture d’un article[1] ce matin m’a inspiré celui-ci (merci chère J . d’y avoir attiré mon attention). Je ne débattrai pas du fond de l’article, mais son titre interpelle « Il faut savoir dire : nous nous sommes trompés ».

Errare humanum est, perseverare diabolicum (attribué à Sénèque)

Passée la tentation des polémiques et des accusations portées au monde politique, il est intéressant d’observer si nous sommes, individuellement, à l’échelle de nos vies, capables de dire « je me suis trompé ». Je me suis trompé. Je suis à la fois acteur et victime de cette tromperie. Et c’est là que réside tout l’intérêt, et toute la difficulté, de le reconnaître. 

Voyons l’intérêt d’abord : si je suis victime d’une tromperie, je risque fort d’en déduire des choses fausses, d’entreprendre des actions inadéquates, d’accuser ou d’encenser injustement. Et plus la tromperie dure, plus l’erreur persiste et se répand, avec sa cascade de conséquences et d’injustices. On peut ici se rappeler[2] que la colère peut naître de ce type de comportement : je me trompe sur quelqu’un, son attitude présumée me met en colère, je l’accuse injustement, etc…
En revanche, si je comprends et reconnais que je me suis trompée, je peux rapidement rétablir une situation plus juste et mon action redevient efficace[3]. Pensons, dans nos vies, à nos propres certitudes de parents, de professionnels, à nos difficultés à écouter le nouveau venu, qui pourtant peut être celui qui a la clé du problème, bien qu’elle soit très différente de ce que l’on croit savoir, toutes ces choses auxquelles nous nous sommes agrippés avec ferveur et qui pourtant, une fois lâchées, ont permis de trouver des solutions opérantes, de devenir plus performantes.
Enfin, si vous avez déjà reconnu que vous vous étiez trompé, avez-vous constaté comme l’autre vous en est reconnaissant, dans le meilleur des cas admiratif, et dans le pire désarmé?
Nous n’avons semble-t-il rien à gagner et tout à perdre de persister dans nos erreurs.

Vraiment ? Alors pourquoi persistons-nous tant? J’y vois 4 raisons :

  1. N’oubliez-pas que l’on s’est trompé soi-même. On est donc le trompeur autant que le trompé. Difficile à reconnaître. Difficile n’est-ce pas de dire « je suis le trompeur ». On n’est pas loin de la volonté délibérée du mensonge.
  2. Etant le trompeur, donc le coupable, je suis aussi potentiellement l’incompétent, l’ignorant, le fat. J’ai affirmé avec force, parfois avec véhémence, une chose fausse. Pas très facile à reconnaître. Même en son for intérieur.
  3. Ce que j’affirme avec tant de force et tant d’erreur est bien souvent le produit d’une croyance. Vous vous souvenez[4], cette chose que l’on croit mais qu’on ne peut pas démontrer ? Et comme nous l’avons vu, nous sommes très attachés à nos croyances. Et elles nous privent de liberté. Y compris de la liberté de reconnaître que l’on s’est trompé.
  4. Ça peut faire très mal ! Reconnaître que l’on s’est trompé peut faire naître un douloureux sentiment de culpabilité lorsque cette erreur a fait des victimes. Voyez avec quelles difficultés un parent accepte qu’on lui dise qu’il n’a pas agi comme il aurait fallu avec un des ses enfants. Vous sentez comme il est difficile d’accepter que l’on a pu nuire à autrui, encore plus quand cet « autrui » est l’une des personnes que l’on aime le plus au monde.

Vous comprenez maintenant que même si l’on a tout à gagner, par la suite, à reconnaître que l’on s’est trompé, le passage à l’acte est extrêmement difficile.
Mais je suis sûre qu’en me lisant vous avez déjà trouvé des raisons de pardonner à celui qui reconnaîtrait son erreur. Vous vous êtes dit qu’il l’avait fait de bonne foi, qu’il avait été mal informé, que c’était ce qu’on lui avait appris (combien de contre-vérités circulent encore dans l’enseignement) qu’il avait cru faire ce qu’il y avait de mieux…
Et vous avez raison ! Alors accordez-vous ce pardon, et commencez à reconnaître quand vous vous êtes trompés !

Pour cela, je vous propose l’exercice suivant :

Exercice 14 : Reconnaître que l’on s’est trompé

Munissez-vous de votre cahier et de votre stylo, et sur une page blanche, en titre, écrivez une chose à propos de laquelle vous savez que vous vous êtes trompé mais ne l’avez pas reconnu (peut-être ne le reconnaissez vous vis-à-vis de vous même qu’à cet instant).
En dessous, tirer un trait vertical de manière à séparer votre page en 2 colonnes.

Dans la colonne de gauche, notez toutes les raisons qui rendent difficile pour vous de reconnaître cette erreur. Relisez-vous et pardonnez-vous si vous en éprouvez le besoin. Vous avez fait de votre mieux. Il n’y a pas de vie sans erreur. Et vous êtes en train de la réparer, et ça change tout.

Dans la colonne de droite, notez tous les bénéfices que vous aurez à reconnaître votre erreur, pour vous-même et pour les autres. Imaginez le soulagement peut-être, les actions possibles, les belles émotions.


Maintenant décidez de ce que vous voulez en faire

Très bonne semaine?

Version Audio


[1] https://www.nouvelobs.com/coronavirus-de-wuhan/20200416.OBS27603/tribune-confinement-il-faut-savoir-dire-nous-nous-sommes-trompes.html

[2] voir l’article sur ce blog : https://www.paulinecharneau.com/exercice-n11-en-colere-adoptez-la-perspective-de-ladversaire/

[3] L’histoire de la science est faite d’erreurs successives qui ont mené finalement à ce qui semble « la vérité » qui, même si elle est encore imparfaite, se rapproche du but. Il a fallu que des scientifiques éminents acceptent de dire « nous nous sommes trompés » pour parvenir à progresser. Certains ont su le faire, d’autres pas, et les entêtements ont souvent été coûteux pour la société. Pensons aux médecins de Molière, mais aussi aux balbutiements de la psychiatrie, aux tâtonnements autour du virus du moment, tâtonnements inévitables mais qui deviennent inacceptables quand ils sont accompagnés d’arrogance, aux méthodes pédagogiques (haa la méthode globale), aux certitudes environnementales …

[4] voir l’article : https://www.paulinecharneau.com/exercice-n3-assouplir-ses-croyances-et-comprendre-pourquoi/

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